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Seniors : comment éviter la dépendance après une hospitalisation ?

Publié le 08/06/18

Suite à une hospitalisation, les personnes âgées ont jusqu’à soixante fois plus de risque de développer des incapacités fonctionnelles. Une sur six augmente son niveau de dépendance de façon importante. Les chiffres sont implacables et inquiétants. Quelles sont les mesures à adopter pour prévenir ce que l’on appelle la « dépendance iatrogène » ? Dossier réalisé à l’occasion de la parution des recommandations conjointes de la Haute Autorité en Santé et du Conseil National Professionnel de Gériatrie.

La « dépendance iatrogène » évitable dans 80% des cas

En France, près de trois millions de personnes âgées de 70 ans et plus sont hospitalisées une ou plusieurs fois en services de soins aigus chaque année. Ces personnes âgées représentent 29% des séjours hospitaliers en service de soins aigus.

Dr Sandrine Sourdet, gériatre au CHU de Toulouse et membre de la Société française de gériatrie et de gérontologie (SFGG)* : « la « dépendance iatrogène » ou « dépendance liée à l’hospitalisation » est la perte de capacité fonctionnelle que vont présenter les personnes âgées hospitalisées à la suite de cette hospitalisation. Elle est due en partie au terrain du patient (statut fonctionnel, cognitif, thymique et nutritionnel, fragilité, sédentarité, maladies associées et traitements), à la pathologie qui le mène à l’hospitalisation et surtout aux soins qui lui sont prodigués au cours de cette hospitalisation. Les soins apportés aux personnes âgées pendant leur séjour peuvent être plus délétères que bénéfiques ».

La dépendance iatrogène liée à l’hospitalisation est dite évitable lorsqu’elle est la conséquence d’une mesure de soins inappropriée ou omise, ou d’un environnement inadapté. Selon une étude réalisée au centre hospitalier de Toulouse, la dépendance iatrogène des personnes âgées serait de l’ordre de 10 % et serait évitable dans 80 % des cas.

Les six causes de dépendance « iatrogène »

Les facteurs de risque de dépendance iatrogène liée à l’hospitalisation des seniors sont nombreux :

  • Le « syndrome d’immobilisation » est à l’origine de la survenue de problèmes de santé qui étaient potentiellement latents, à savoir une perte rapide de la masse musculaire et de l’autonomie et une augmentation du taux de ré-hospitalisations. 70 à 83 % du temps passé à l’hôpital est passé allongé au lit, alors que la restriction d’activité est rarement justifiée médicalement.
  • La confusion aiguë touche 29 à 64 % des personnes âgées pendant leur hospitalisation. D’où un risque augmenté de déclin fonctionnel, de chutes, de syndrome démentiel, d’hospitalisation prolongée et d’entrée en institution.
  • La dénutrition lors de l’hospitalisation est liée à un apport alimentaire insuffisant et/ou à un accroissement des besoins liés à la maladie. 35 % des seniors sont dénutris à l’admission, et 50 % à la sortie ! Or la dénutrition accroît la mortalité, les complications (confusion, infection, perte de masse musculaire, retard de cicatrisation, escarres, etc.), le risque d’entrée en institution, une diminution de l’autonomie et de la qualité de vie. Les chutes sont fréquentes chez les personnes âgées hospitalisées, sources de blessures dans 30 à 40 % des cas, de traumatismes (sévères dans 5 % des cas), de peur de tomber, de syndrome post-chute (symptômes susceptibles d'entraîner une perturbation de la marche, le maintien dans l'espace, perturbations psychologiques), de perte d’autonomie et d’une augmentation de la durée de séjour à l’hôpital.
  • L’incontinence urinaire touche 20 % des personnes âgées et sa fréquence augmente avec l’hospitalisation (14 % à l’admission et 33,5 % à la sortie). Elle est multifactorielle, liée au vieillissement de l’appareil vésico-sphinctérien, aux comorbidités (maladies associées) et aux troubles cognitifs. Lors de l’hospitalisation, elle est favorisée par certaines médications, des conseils diététiques ou prises en charge inadaptés, en particulier le port de protection urinaire non justifié. La rétention vésicale et le sondage vésical (introduction d'une sonde stérile par l'urètre pour drainer la vessie) sont aussi des facteurs de risque d’incontinence urinaire, de confusion, de syndrome d’immobilisation et d’infection urinaire.
  • Les effets indésirables des médicaments sont courants (psychotropes et anticholinergiques en particulier). Ils sont soit dus aux effets pharmacologiques, aux interactions médicamenteuses, au caractère inapproprié ou inutile du traitement, à des prescriptions manquantes, à une non-observance ou à des erreurs. Leur prévalence augmente avec la polymédication, pour atteindre 58 % avec 5 médicaments et 82 % avec 7 médicaments et plus. Ils sont associés à une augmentation des risques de chute, de confusion, de déclin fonctionnel et de décès, ainsi qu’à une augmentation de la durée de séjour hospitalier.

La dépendance suite à une hospitalisation, un fléau que l’on peut prévenir

Les protocoles de soins pour la population adulte sont finalement inadaptés aux personnes âgées. Chez elles, une prise en charge gériatrique globale s’impose, et non pas se contenter de traiter uniquement la maladie aiguë. En pratique, la bonne attitude fait appel au bon sens.

Dr Sandrine Sourdet : « Par exemple, une personne âgée ne doit pas rester alitée systématiquement. Elle doit être mise au fauteuil et il faut lui proposer de marcher lorsque l’évaluation du risque de chute l’y autorise. Il faut la laisser aller aux toilettes seule si elle était capable de le faire avant l’hospitalisation plutôt qu’imposer une protection urinaire. La sonde urinaire et les protections urinaires ne doivent pas être systématiques ! Les médicaments potentiellement sédatifs doivent être évités. Vu le risque de dénutrition, il faut être particulièrement vigilant vis-à-vis des apports alimentaires, le poids, etc. ».

Lorsque la personne âgée est particulièrement à risque (plus de 80 ans, déjà hospitalisée auparavant, troubles cognitifs, isolée, dépressive, dénutrie…), des mesures supplémentaires sont indispensables.

C’est le rôle des équipes mobiles de gériatrie qui existent dans les centres hospitaliers. Un triste constat : seulement 50% des personnes âgées qui ont perdu leurs capacités fonctionnelles vont les récupérer…

*www.has-sante.fr Novembre 2017. Document disponible à cette adresse :

https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2017-0/prevenir_la_dependance_iatrogene_liee_a_lhospitalisation_chez_les_personnes_agees_-_fiche_points_cles.pdf

*Pour en savoir plus : https://sfgg.org/

Hélène Joubert, journaliste

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