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Asthme : des traitements efficaces mais trop peu suivis

Publié le 08/08/18

L’asthme touche 4 millions de Français. En suivant régulièrement leur traitement, 9 asthmatiques sur 10 pourraient avoir une vie normale. Pourtant, près de 1 sur 2 oublie ou néglige ses médicaments. Le point avec le Pr Alain Didier, chef du service de pneumologie au CHU de Toulouse.

Le souffle court, une difficulté à faire parvenir de l’air jusqu’aux poumons, l’impression d’étouffer, des sifflements dans la poitrine : c’est ce que ressentent, à des degrés variables, les personnes en proie à une crise d’asthme. Chez les asthmatiques, les bronches présentent une sensibilité excessive à certains facteurs stimulants, ce qui se traduit par une inflammation chronique. « Il s’agit de la maladie chronique la plus fréquente chez l’enfant – entre 9 et 10 % sont concernés – et de la pathologie respiratoire chronique la plus courante chez l’adulte avec une prévalence de 7 à 8 % », détaille le Pr Alain Didier, chef du service de pneumologie au CHU de Toulouse. Au total, environ 4 millions de Français doivent composer avec cette pathologie dont les symptômes varient selon les individus. Les uns ne sont incommodés que par des crises sporadiques, les autres toussent fréquemment et sont gênés au moindre effort. D’autres encore, entre 5 et 10 % des asthmatiques, présentent une forme sévère de la maladie, avec des symptômes quotidiens, des crises à répétition et une fonction respiratoire souvent altérée. Dans tous les cas, les crises peuvent être graves, conduire aux urgences, en réanimation, voire présenter une issue fatale. Environ 1 000 personnes décèdent ainsi d’asthme chaque année et 600 000 journées d’hospitalisation sont imputables aux soins d’urgence prodigués aux personnes asthmatiques. Si l’on ajoute le coût des traitements, des arrêts maladie et de l’ensemble des conséquences sociales de la maladie, l’asthme pèse pour plus de 1 milliard d’euros dans les dépenses de santé publique.

Une maladie multifactorielle

Difficile de savoir précisément ce qui est à l’origine de la maladie chez une personne, a priori, en bonne santé. « Il y a d’abord un terrain génétique avec des gènes prédisposants auxquels se greffent des facteurs environnementaux, explique le Pr Didier. L’exposition à des produits irritants dans le milieu professionnel (peintures, produits chimiques…), la présence d’allergènes dans la maison ou à l’extérieur (acariens, pollens, moisissures…), la pollution de l’air ou la fumée de cigarette constituent autant de facteurs de risques. »
D’autres particularités prédisposent à devenir asthmatique, comme les naissances prématurées, les bronchiolites à répétition pendant la petite enfance, l’obésité, le fait d’être issu d’une famille dans laquelle les allergies ou l’asthme sont fréquents, etc. Dans tous les cas, la qualité de l’environnement est déterminante dans l’apparition de l’asthme. Ce qui explique que la prévalence de la maladie chez les enfants a presque doublé au cours des deux dernières décennies. « Les raisons tiennent essentiellement au milieu dans lequel nous évoluons, assure le Pr Didier.
Nous vivons davantage à l’intérieur, nous devons composer avec un air chargé de particules irritantes, nous mangeons des aliments qui modifient la composition de notre flore intestinale et, du coup, influent sur le fonctionnement de notre système immunitaire… Bref, nous sommes de plus en plus exposés à des éléments allergènes et irritants susceptibles de donner naissance à une inflammation des bronches. »

Traitement quotidien

L’asthme ne se guérit pas. Tout l’enjeu de la prise en charge consiste donc à espacer et à raréfier les crises. Cela passe en premier lieu par l’élimination des facteurs déclenchants, puis par l’administration d’un traitement. Pour la grande majorité des personnes asthmatiques, il permet de contrôler efficacement la maladie. « Ceux qui font une crise de temps en temps peuvent se contenter d’un bronchodilatateur de secours. C’est le cas pour 30 à 40 % des asthmatiques, indique le pneumologue. La majorité des malades a toutefois besoin d’un traitement de fond basé sur une association de corticoïdes et de bronchodilatateurs pour diminuer l’inflammation, endiguer une gêne plus fréquente et limiter la fréquence des crises. »
Les traitements sont efficaces, permettant d’avoir une vie normale et de pratiquer une activité physique à neuf asthmatiques sur dix. À condition d’être suivis régulièrement. Or, environ un patient sur deux n’y parvient pas. « Soit parce qu’ils peinent à utiliser le dispositif d’inhalation qui, du coup, rend inefficaces les molécules, soit parce qu’ils ont naturellement tendance à arrêter de prendre leur traitement en dehors des crises, quand tout va bien, regrette le Pr Didier. Il est alors essentiel pour les médecins de bien faire prendre conscience aux patients qu’ils souffrent d’une maladie qui nécessite un traitement quotidien pour éviter des crises graves et l’installation d’une gêne handicapante au quotidien. »
Reste les asthmatiques sévères, ceux pour lesquels les traitements de base ne permettent pas de contrôler la pathologie. C’est en particulier sur ces patients que se concentrent les travaux de recherche sur de nouvelles molécules. Depuis une dizaine d’années, ils peuvent bénéficier des « anticorps anti-IgE » destinés à bloquer la production par l’organisme de substances responsables de l’inflammation allergique des bronches. L’année prochaine, un nouveau traitement devrait être commercialisé : il s’agit des médicaments dits « anti-IL5 », dirigés contre certaines protéines également impliquées dans un type de réaction inflammatoire qu’on retrouve fréquemment dans l’asthme. Comme pour les nouveaux traitements du cancer, ceux de l’asthme deviennent personnalisés. « Dès lors qu’il existe de nombreuses formes d’asthme, les travaux s’orientent désormais vers l’identification des particularités de chacun pour pouvoir prescrire la molécule adaptée à la situation individuelle des patients », conclut le Pr Alain.

Avis d’expert

Une maladie multiforme
« Il existe de nombreuses formes d’asthme, aussi est-il impossible d’imaginer un unique vaccin qui protégerait de la maladie l’ensemble de la population. La recherche se tourne donc plutôt vers des thérapeutiques orientées selon les différents types d’asthme. Elles s’inscrivent dans le cadre des traitements ciblés, à l’image des nouvelles molécules telles que les anti-IgE, les anti-IL5, et même les anti- IL13 encore au stade de développement. » Pr Alain Didier, chef du service de pneumologie au CHU de Toulouse.

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