Santé mentale des jeunes : l’état d’urgence ?
La santé mentale des 11-24 ans ne cesse de se dégrader. Les explications et les conseils du Pr Florian Ferreri, psychiatre.
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Toute prise d’alcool au cours de la grossesse, même un verre à l’occasion, n’est pas anodin. L’exposition prénatale à l’alcool présentant en effet un risque pour le fœtus avec, à l’extrême, le syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF). Piqûre de rappel sur un problème majeur de santé publique en ce 9 septembre, lors de la journée internationale de prévention du SAF.
On ne sait pas aujourd’hui définir la quantité minimale d’alcool qui est toxique pour l’enfant à naître. C’est pourquoi, par principe de précaution, la règle pendant la grossesse est de ne boire aucune goutte d’alcool. En effet, lorsqu’une femme enceinte boit de l’alcool, son taux d’alcoolémie et celui de son enfant sont identiques. Or, les troubles du neurodéveloppement de l’enfant sont directement liés à la toxicité de l’alcool sur son système nerveux lorsqu’il est dans le ventre de sa mère.
Ces troubles causés par l’alcoolisation fœtale sont multiples, plus ou moins nombreux chez un même enfant. Ils vont de troubles du comportement jusqu’à la forme caractéristique et sévère du « syndrome d’alcoolisation fœtale ». 1000 enfants en France nés en 2016 avaient un « SAF » (1).
La liste de cette maladie liée à l’alcool est longue : retard de croissance, taille anormalement petite du crâne, malformations du visage ou viscérales (cœur…), développement neurologique perturbé (troubles de l’attention ou de la mémoire, difficultés d’acquisition du langage, du calcul ou d’insertion sociale et parfois retard mental).
Plus largement, l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale (TCAF) -dont fait partie la forme extrême qui est le SAF- touche 1% des naissances par an, soit environ 7000 cas en 2016.
Dr David Germanaud, service de Neuropédiatrie et Pathologie Métabolique Hôpital Robert Debré (Paris) : « La particularité de la maladie du développement liée à l’alcool est qu’elle donne un spectre très large de troubles, allant de la déficience intellectuelle modérée à légère à des troubles témoignant de déficits plus sectorisés. La situation la plus fréquente en cas de troubles causés par l’alcoolisation fœtale (TCAF) est celle d’un trouble cognitif complexe de type "multidys" qui associe plusieurs « dys » ou troubles cognitifs spécifiques (déficit du langage/dyslexie, des coordinations/dyspraxie, des apprentissages scolaires/dysorthographie etc.) alors que l’efficience intellectuelle reste normale. Singulièrement, l’une des dysfonctions les plus prévalentes et incapacitantes est le syndrome "dysexécutif", c’est à dire la difficulté parfois très sévère à contrôler son fonctionnement cognitif mais aussi émotionnel. ».
1,5 à 2 millions de personnes sont alcoolodépendantes en France et les femmes comptent pour un quart environ. L’alcoolisme féminin reste largement sous-estimé. Or vis-à-vis de l’alcool, celles-ci sont plus susceptibles de développer un sentiment de honte ou de culpabilité qui les empêche de demander de l’aide, a fortiori pendant la grossesse. A cela s’ajoute le facteur aggravant d’une banalisation par la société de la consommation de petites quantités d’alcool au cours de la grossesse. Des idées reçues sont bien ancrées dans les esprits, comme le fait qu’il existe des alcools forts et des alcools faibles, ce qui est totalement faux car un verre standard de bière, de whisky, de vin, de pastis... contiennent la même quantité d’alcool pur (environ 10 grammes). Cette prise de conscience insuffisante est à l’origine de sollicitations multiples auxquelles la femme enceinte peut avoir du mal à résister. Si la précarité représente un facteur de risque majeur, toutes les femmes sont concernées, quel que soit leur milieu, car les modes de consommation ont évolué : étudiantes ou diplômées lors de soirées festives, femmes à responsabilités lors de cocktails ou de repas d’affaires, alcoolisme « mondain » etc.
Dr Germanaud : « Même légère et occasionnelle (moins d’un verre par semaine et moins de 2 par occasion), une alcoolisation est déconseillée. En revanche, une exposition modérée préoccupante (plus d’un verre par semaine ou de 2 verres par occasion à plusieurs reprises) ou sévère (2 verres d’alcool en moyenne par jour ou plus de 4 verres lors d’un épisode par semaine) impose la mise en place d’un suivi spécialisé du bébé en néonatalogie lors du 1er semestre puis en PMI, ainsi qu’en neuropédiatrie en cas de signes de SAF (anomalies morphologiques, retard staturo-pondéral) (2). Les expositions lourdes à l’alcool pendant la grossesse concernent entre 2 et 5% des grossesses, selon les régions. En cas d’exposition lourde à l’alcool chez des femmes alcoolodépendante – un cas de figure loin d’être rare- 50 à 75% de leurs enfants vont développer des TCAF. »
Toutes les femmes enceintes ne réagissent pas de façon identique face à l’alcool. Près d’un tiers consomme encore occasionnellement des boissons alcoolisées. D’autres, qui avaient une consommation habituelle non excessive stopperont immédiatement leur consommation d’alcool dès qu’elles apprennent leur grossesse. Inversement, d’autres ont une consommation excessive et ont développé une dépendance qu’elles auront tendance à cacher de peur des conséquences, comme celle de se voir retirer l’enfant.
Toutes les femmes enceintes peuvent se tourner vers un professionnel de santé, médecin généraliste, gynécologue, sages-femme, échographiste, professionnels de Protection Maternelle et Infantile etc.) mais aussi des équipes spécialisées, formées et capables d’aider la femme enceinte ayant un problème avec l’alcool quel que soit le stade de sa grossesse. Ils la rassureront et lui confirmeront que toute période d’abstinence d’alcool est bonne pour son bébé.
Les adresses les plus proches de chez soi sont sur alcool-info-service.fr ou en téléphonant au 0 980 980 930 (7 jours/7, de 8h à 2h, appel anonyme et non surtaxé).
Le pictogramme, illustrant le « zéro alcool pendant la grossesse », est apparu en octobre 2007 sur le conditionnement des boissons alcoolisées. La sensibilisation du grand public sur les conséquences de l’alcool au cours de la grossesse a-t-elle progressé pour autant ? Les résultats de l’enquête BVA (3) 2017 sont encourageants. 86% des personnes interrogées pensent qu’il ne faut pas boire du tout d’alcool pendant la grossesse. Mais les idées reçues ont la vie dure puisque 22% pensent toujours que les femmes enceintes peuvent s’autoriser un petit verre de vin de temps en temps. Pour le bébé, le risque survient dès le premier verre, jugent 37% des sondés, alors qu'ils n'étaient que 22% en 2015.
Quant aux types de risque encourus par le bébé, ils sont de mieux en mieux cernés par le grand public, comparé aux années précédentes : retards de croissance du fœtus (96%), anomalies physiques du bébé (95%), troubles de la mémoire chez l'enfant (91%), accouchement prématuré (89%), manque de concentration à l'école (87%) ou encore mauvaise vue chez l'enfant (83%).
(1) Fiche mémo HAS - Troubles causés par l’alcoolisation foetale : repérage. Juillet 2013 et communication du Dr Germanaud, Les Rencontres de Santé Publique France, 31 Mai 2017 ; (3) « Alcool et grossesse : Connaissances et perceptions des risques du grand public ; Evolutions depuis 2004 », juin 2017.
D’après un entretien avec le Dr David Germanaud, Service de Neuropédiatrie et Pathologie Métabolique Hôpital Robert Debré (Paris).
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