Aller au contenu principal

Sommaire

Savoir reconnaître la douleur des petits, pour mieux la soulager

Publié le 22/06/18

Même prématuré, l’enfant naît avec un circuit de la douleur opérationnel

Le nouveau-né (0-28 jours) et le bébé (29 jours à deux ans) sont équipés pour ressentir la douleur mais ils la perçoivent encore plus fortement que le petit enfant (2-6 ans) et a fortiori l’adulte. En effet, avant l’âge de 1 an, les mécanismes « inhibiteurs » qui servent à réduire le ressenti douloureux ne sont pas matures.

De plus, dès la naissance, lorsqu’un message douloureux est perçu, il est aussi connecté aux régions du cerveau liées aux émotions, aux pensées, à la réflexion et surtout à la mémorisation. En conséquence, pour le même geste douloureux ou type de douleur, la douleur suivante sera supérieure à celle du premier geste.

Enfin, si les émotions couplées à la douleur (peur, angoisse, tristesse) sont bien-sûr ressenties déjà par le nourrisson, l’aspect cognitif, c’est à dire le raisonnement inspiré par une douleur (causes, traitement possible, attitude à adopter etc.) fait en revanche défaut au bébé jusqu’à 2-3 ans, pour ne se développer vraiment qu’après 6 ans.

Dr Elisabeth Fournier-Charrière, pédiatre au Centre d'étude et de traitement de la douleur de l'adulte et de l'enfant (CHU Bicêtre) et co-auteur du Guide « la douleur de l’enfant, l’essentiel » PEDIADOL : « Jusqu’à deux ans, l’enfant ne comprend pas ce qui lui arrive, d’où sa détresse intense avec des cris, des pleurs, des gesticulations. Passé l’âge de 2 ans, avec un début de langage et de raisonnement, il commence à comprendre les causes, mais est toujours facilement envahi de façon globale par la douleur. Ainsi, jusqu’à 6-7 ans, comme l’enfant vit encore « dans l’instant », la douleur est perçue comme dramatique et est très souvent vécue comme une punition ».

A chaque âge son expression de la douleur

Le nourrisson et le bébé ne font rien d’autre qu’exprimer leur ressenti selon leurs possibilités : ils sont « perdus » dans ce qui leur arrive. Contrairement au nourrisson, le petit enfant à partir de 18 mois-2 ans va acquérir des mécanismes pour se rassurer, c’est-à-dire interagir (avec le début du langage) pour chercher le réconfort d’une grande personne, s’attacher à des objets d’amour, se distraire etc. Les manifestations de la douleur dépendent de l’âge et des possibilités de communication. Avant le langage, c’est le corps qui va s’exprimer d’abord par des cris, la grimace, une agitation, et se débattre. Mais si la douleur se prolonge, tous les enfants (dès la naissance) vont se replier sur eux-mêmes pour se défendre contre cette sensation.

Dr Fournier-Charrière : « C’est alors un signe d’alerte, l’enfant est prostré et n’entre plus en relation (immobilité, défaut d’expression et de communication, refus de boire, de manger, trouble du sommeil). C’est typiquement le bébé « grognon » qui a une otite. Le repère clé pour les parents est : « Pas comme d’habitude ». Il joue moins, cherche plus de réconfort, tient l’endroit douloureux, a des activités inhabituelles, pleurniche plus, gémit ou grogne plus, est plus calme, plus inquiet, a moins d’énergie, mange moins... Ces dix comportements anormaux à repérer sont colligés dans une échelle appelée PPMP (Postoperative Pain Measure for Parents) destinée aux parents* ».

Chez le petit enfant, c’est presque pareil : il peut hurler au début mais, très vite, il va trouver une position antalgique et ne pleure plus que par moments, refuse qu’on le touche, proteste. Il y a chez lui une adaptation de la position mais aussi une plainte exprimée par la parole, même au début du langage. Il faut attendre 5 à 6 ans pour que l’enfant puisse indiquer l’intensité de sa douleur et la décrire (« ça tape ou ça brûle ou ça pique… »). Les échelles d’auto-évaluation de la douleur avec les visages expressifs (réglette des visages) peuvent être utilisées dès 4-5 ans.

Douleur : que faire à la maison ?

La douleur est une sensation mais aussi une émotion. Les moyens non médicamenteux sont puissants vis-à-vis de la douleur ; l’écoute et le réconfort (être en confiance, rassuré, écouté) permettent de minimiser le ressenti douloureux, ainsi que la distraction qui détourne l’attention de l’enfant par des stimulations visuelles, auditives, tactiles...

En ce qui concerne l’utilisation des antalgiques (Paracétamol, Ibuprofène) ils doivent être utilisés strictement sur prescription du médecin traitant généraliste ou pédiatre. Quant au nouveau-né, il importe pour le soulager d’associer la tétine et le bercement, et de veiller à la façon dont il est soutenu. Une technique est de soutenir avec ses quatre membres regroupés en flexion).

Pour en savoir plus :

-« Votre enfant a mal. Que faire ? » Brochure de l’association SPARADRAP, une mine d’infos pratiques pour soulager la douleur de son enfant au quotidien. http://www.sparadrap.org/

-*« La douleur de l’enfant, l’essentiel » PEDIADOL (www.pediadol.org) Postoperative Pain Measure for Parents pour l'évaluation de la douleur par les parents d'enfants de 2 à 12 ans pour chaque item, score 0 (signe absent) à 1 (signe présent) total sur 15.

D’après un entretien avec le Dr Elisabeth Fournier-Charrière, pédiatre au Centre d'étude et de traitement de la douleur de l'adulte et de l'enfant (CHU Bicêtre).

Hélène Joubert, journaliste

En ce moment sur le Blog

Voir tous les articles

Santé mentale des jeunes : l’état d’urgence ?

La santé mentale des 11-24 ans ne cesse de se dégrader. Les explications et les conseils du Pr Florian Ferreri, psychiatre.

Ma santé
4 min
Lire l’article

Fin de vie : avec les directives anticipées, chacun a le droit de décider

Les directives anticipées permettent d’exprimer ses volontés en situation de fin de vie. Voici ce qu’il faut savoir.

Ma santé
3 min
Lire l’article

Reste à charge et tarif des consultations médicales : ce qui change ou va changer pour les assurés

Reste à charge porté à deux euros depuis le 15 mai 2024, tarifs en des consultations médicales en hausse. Que retenir de ces nouveautés ?

Ma santé
3 min
Lire l’article