Santé mentale des jeunes : l’état d’urgence ?
La santé mentale des 11-24 ans ne cesse de se dégrader. Les explications et les conseils du Pr Florian Ferreri, psychiatre.
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L’automne est là. Les vacances sont déjà loin et la baisse de luminosité, le passage à l’heure d’hiver et la chute des températures n’arrangent rien. Pour affronter cette période, être en forme est indispensable. Or, qui dit "forme", dit "sommeil réparateur". Il est temps de resynchroniser son horloge interne et donc son sommeil.
Loin du stress et du quotidien, les vacances estivales permettent de récupérer la carence de sommeil accumulée pendant l’année. Mais toutes vacances comme, par exemple, une coupure à la Toussaint, permettent de récupérer du point de vue du stress, ce qui est important pour le sommeil.
Par ailleurs, connaître son sommeil est un prérequis pour mieux dormir. A cette fin, il faut être attentif à son rythme biologique personnel, notamment à l’occasion de vacances prolongées. « On est alors plus proche de son rythme biologique personnel, révèle le Dr Sylvie Royant-Parola, psychiatre et neurobiologiste (Paris). C’est l’opportunité de découvrir la durée de sommeil dont on a réellement besoin, ainsi que sa typologie de sommeil, qui peut être soit "du matin", soit "du soir". En effet, en conditions de vacances, l’absence de stress fait que l’on dort généralement plus longtemps, aux alentours d’une heure et demie. Par exemple, 10h30 de sommeil en moyenne en vacances équivalent à au moins 9h de sommeil nécessaire en conditions de travail ».
En ce qui concerne la typologie de sommeil, il faut observer le rythme que l’on adopte après deux semaines de vacances, une fois reposé et relaxé. Si l’on continue de se lever à 8 heures, c’est la démonstration qu’on est bien "du matin". En revanche, si on décale ses horaires de sommeil en se levant tard et se couchant tard, on sera plutôt "du soir". Dans ce dernier cas de figure, le rythme circadien (rythme veille/sommeil) est contrarié par les horaires de travail classiques. D’où l’intérêt d’envisager - si possible - des aménagements horaires. Bien souvent, décaler de 30 minutes seulement son arrivée au travail suffit. Être "du soir" signifie que malgré l’heure tardive du coucher, le sommeil sera meilleur car plus profond et donc plus réparateur. « C’est pourquoi un "couche-tard" ne devra pas chercher à se coucher avant 11h30-minuit, au risque de problème d’endormissement ou de sommeil trop léger », avertit la spécialiste des troubles du sommeil.
L’important est de se lever à heures fixes, y compris le week-end. Le respect d’horaires réguliers de coucher et de lever est la clé d’une resynchronisation optimale. Idéalement, ce devait être anticipé huit jours avant la fin de vacances prolongées (ou deux-trois jours lors de petites vacances), en programmant le réveil plus tôt de façon progressive.
Pour ne pas céder à la tentation des grasses matinées le week-end, s’aménager de courtes siestes l’après-midi de 20 à 30 minutes peut aider. Le Dr Royant-Parola est formelle : « lorsque l’on est en déphasage de rythme circadien comme au retour des vacances, en cas de carence de sommeil ou de jet lag (syndrome du décalage horaire ou « arythmie circadienne »), etc. « Il vaut mieux récupérer le temps de sommeil sur un temps de sieste qu’en se levant tard ». S’il est possible de se ménager un quart d’heure de sieste même au travail, c’est l’idéal. On craint souvent de ne trouver le sommeil que plus tardivement le soir à cause d’une sieste en milieu de journée. En réalité, ceci est uniquement vrai pour de longues siestes.
Le matin, se rendre à son travail en vélo, à pied ou parcourir l’équivalent de deux stations de métro à pied est une astuce pour recadrer son sommeil ; l’important étant de pratiquer une activité en extérieur le matin car l’exposition à la lumière au réveil facilite le recadrage du rythme circadien. La lumière, le jour, est le facteur essentiel de synchronisation de l’horloge interne. Celle-ci est un petit noyau consitué de neurones, de la taille d’une tête d’épingle situé dans une région cérébrale appelée hypothalamus. Elle régule le rythme veille/sommeil. Lorsque l’horloge reçoit le message transmis par la lumière en journée, l’organisme est synchronisé. L’exposition à une lampe de photothérapie (luminothérapie) lors du petit déjeuner fait aussi l’affaire.
De plus, l’activité physique - qui favorise le sommeil via la dépense énergétique qu’elle induit – est tout bénéfice pour bien dormir. De type cardio-training (jogging, marche rapide, vélo d’appartement) et régulière (au minimum quatre séances hebdomadaires), elle devrait être programmée le matin ou à la pause méridienne plutôt que le soir, lorsque les activités professionnelles et familiales le permettent, bien évidemment.
Déconnecter une heure environ avant le coucher est une autre bonne habitude à prendre, en se réservant un sas de détente avec une activité calme (lecture), loin de tout écran. En effet, la lumière, même de faible intensité comme celle apportée par les LED bleues des tablettes ou des téléphones portables, inhibe la sécrétion de mélatonine qui est l’hormone de l’obscurité, facilitatrice du sommeil.
Une douche tiède 30 minutes avant le coucher est utile mais uniquement lorsque les journées sont encore chaudes, en cas d’été indien. Quant aux tisanes (tilleul, fleur d'aubépine, verveine et bien d’autres), elles peuvent faciliter l’endormissement du fait d’un rituel apaisant.
Dans toutes les situations où le cycle lumière-obscurité est modifié, l’horloge est en situation de désynchronisation. Son importance dépend de la durée de désynchronisation. Le Pr Yvan Touitou (Unité de Chronobiologie, Fondation A. de Rothschild, Paris), membre de l’Académie nationale de médecine, explique : « la désynchronisation est un état dans lequel le temps biologique (l’horloge) et le temps astronomique (la montre) sont dissociés. Les causes de cette désynchronisation sont nombreuses et peuvent être liées à des synchroniseurs qui se trouvent en conflit avec l’horloge interne (travail posté, travail de nuit, vol transméridien), des synchroniseurs inefficaces (vieillissement, certaines maladies psychiatriques…), des synchroniseurs mal ou non perçus (cécité), un défaut d’entraînement de l’horloge (désordres circadiens du sommeil comme les "syndromes de retard ou d’avance de phase", utilisation abusive des diverses consoles par les adolescents y compris tard le soir...), ou enfin la prise de certains médicaments ou drogues (lithium, propofol, alcool…) ».
Dans ces diverses situations, l’horloge interne ne fonctionne plus en harmonie avec le milieu extérieur, ce qui s’apparente à un jet lag chronique appelé "jet lag social" : horloge et vie sociale sont totalement dissociées. Les situations de désynchronisation, surtout si celle-ci est chronique, peuvent entraîner de sérieux troubles de l’organisme.
L’un des moyens de ne pas tomber dans le "jet lag social" est de veiller à la régularité des horaires de sommeil, du coucher et du lever. « Croire qu’il est possible de récupérer le sommeil "perdu" pendant la semaine à l’occasion du week-end est un leurre », confirme le spécialiste, « en se levant encore plus tard, on se place justement en situation jet lag social ».
Hélène Joubert, journaliste. Merci au Dr Sylvie Royant-Parola, psychiatre et neurobiologiste (Paris) et au Pr Yvan Touitou (Unité de Chronobiologie, Fondation A. de Rothschild, Paris)
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