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Les jambes sans repos, un syndrome trop méconnu

A des intensités diverses, 2% de la population souffre chaque jour du syndrome des jambes sans repos, dont le nom médical est la maladie de Willis-Ekbom. La prise en charge de ce trouble du sommeil parfois très invalidant et, de façon paradoxale, peu connu du grand public mais aussi des neurologues, relève des centres experts.

Publié le 01/08/19

Impatiences : les deux tiers sont des femmes

Les femmes sont deux fois plus touchées par le « syndrome des jambes sans repos » ou « impatiences », avec une intensité des symptômes souvent plus forte, sans que l’on en connaisse la raison. La maladie est aussi plus fréquente avec l’avancée en âge. Une composante familiale est retrouvée chez un malade sur deux et plusieurs gènes de prédisposition à la maladie ont déjà été identifiés.

Au total, en France, ce sont près de 1 300 000 français qui ressentent, au quotidien, les symptômes de la maladie de Willis-Ekbom, le nom médical de cette affection neurologique.

Les mécanismes de cette maladie sont bien élucidés. Ceux-ci sont très souvent lié à une diminution des taux de fer dans certaines régions du cerveau, ce qui entraîne une anomalie de la régulation d’un neurotransmetteur (la dopamine) qui permet la communication entre certains neurones. Outre les répercussions sur le sommeil, la concentration, le travail, l’humeur, la vie sociale, le risque d’accidents à cause de la somnolence… le retentissement est également d’ordre cardiovasculaire et métabolique (risque de surpoids, de diabète, etc.).

En 2019, la maladie demeure encore peu connue, y compris des neurologues, et son traitement à long terme est rarement maîtrisé.

Quatre bonnes questions à se poser

Le diagnostic étant essentiellement clinique, il existe quatre signes à repérer, qui peuvent fortement faire suspecter un syndrome des jambes sans repos.

  • Le repos aggrave les symptômes : les impatiences ou les sensations désagréables sont uniquement présentes au repos ou aggravées par celui-ci (particulièrement en position allongée ou assise).
  • Un besoin irrépressible de bouger les membres : les sensations « désagréables » au niveau des jambes (dans les bras pour 20% des patients) sont associées à la nécessité impérieuse de bouger les membres, avec parfois des fourmillements, des sensations de picotements et de brûlure.
  • Bouger pour se sentir soulagé : le mouvement et la marche améliorent les symptômes.
  • Tout se passe la nuit : les impatiences ou les sensations désagréables apparaissent ou s’aggravent le soir ou la nuit.

Attention, il ne faut pas confondre le syndrome des jambes sans repos avec les crampes ou encore l’insuffisance veineuse profonde. Alors que les impatiences apparaissent au niveau des deux pieds et jambes (mais pas des cuisses) et sont soulagées par le mouvement, les crampes sont, pour leur part, ponctuelles, ciblent un endroit bien précis et seule la décontraction musculaire les soulage. Les jambes lourdes, dans le cas de l’insuffisance veineuse sont améliorées par la position allongée. Par ailleurs, une certaine proportion des 9% d’insomniaques chroniques sévères en France souffre en réalité d’un syndrome des jambes sans repos méconnu.

La juste dose

Au quotidien, quelques conseils peuvent soulager les symptômes : marcher, bouger, se masser les pieds, se doucher les jambes à l’eau fraîche ou faire quelques mouvements de pédalage, allongé sur le dos. De plus, en dehors de la suppression de la xanthine (présente dans le café, le thé et le chocolat, et qui peut détériorer le sommeil et favoriser les symptômes), il n’existe aucune preuve de l’intérêt de conseils alimentaires. Les systèmes réglables d'enveloppement du pied avec des points de pression, ou encore la luminothérapie ne sont pas validés scientifiquement. En revanche, les thérapies comportementales peuvent aider certaines personnes à améliorer l’insomnie.

Mais pour soulager les symptômes, un traitement prescrit à la juste dose est la règle d’or. Les agonistes de la dopamine, médicaments de la maladie de Parkinson, sont souvent utilisés en première intention. « La plus grande complication de cette maladie est une prise en charge souvent tardive et mal adaptée, avec de trop fortes doses de dopamine, ce qui aggrave au contraire la maladie, déplore le Pr Yves Dauvilliers, directeur de l'Unité de Sommeil et coordinateur du centre de référence Hypersomnie Rare (CHU Montpellier, INSERM U1061). C’est pourquoi, en cas de symptômes typiques, il faut se rendre précocement dans un centre expert * car la prise en charge au long cours de cette maladie requiert un avis spécialisé. »

En effet, seules de faibles doses d’agonistes de la dopamine peuvent rétablir une connexion normale entre les neurones. Deux antiépileptiques (gabapentine et prégabaline) et la codéine viennent souvent en renfort. Côté recherche, de nouveaux médicaments sur la base des trois mécanismes existants : - agonistes dopaminergiques, traitements à base de fer et de codéine - sont à l’étude. Mais les chercheurs avancent également sur le versant pronostic vis-à-vis du système cardiovasculaire. En effet, « la présence de mouvements périodiques des jambes, souvent associés au syndrome des jambes sans repos, est responsable d’une élévation de la fréquence cardiaque et de la tension artérielle, explique Yves Dauvilliers. Ces malades ont donc un sur-risque cardiovasculaire que nous essayons de minimiser. Enfin, nous développons des biomarqueurs de diagnostic et de sévérité, pour permettre un diagnostic plus fiable. »

Hélène Joubert, journaliste, avec le Pr Yves Dauvilliers, directeur de l'Unité de Sommeil et coordinateur du centre de référence Hypersomnie Rare (CHU Montpellier, INSERM U1061).

* Association des jambes sans repos

https://www.france-ekbom.fr

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